L'Irak n'est pas le Vietnam

Pour ce qui est de la guerre du Vietnam, la politique américaine visait l'endiguement du communisme, peut-on dire qu'elle s'est trompée d'objectif et qu'elle a échoué? En apparence oui, dans les faits la réponse est non et voilà pourquoi:
En ce qui concerne l'objectif, il s'agissait bien évidement de contenir le communisme ultra-totalitaire tel qu'il était appliqué au Nord Vietnam. La guerre a permis à tout le moins d'en freiner l'expansion durant une dizaine d'années, jusqu'au moment où le communisme a commencé à vaciller sur ses fondements alors que Moscou et Pékin s'enfonçaient inexorablement dans des problèmes économiques insurmontables qui les ont conduit en bout de ligne à renier leur idéologie.
La défaite américaine au Vietnam a été largement auto-infligée. La guerre s'est perdue dans les foyers et au congrès. Le moment historique a aussi été important, puisqu'elle s'est déroulée à l'époque du peace and love, du flower power et de mai 68 qu'elle a marquée et dont elle a souffert.
Mais le fait que le déroulement de la guerre ait eu pour théâtre les foyers américains, ne lui enlève pas son bien fondé stratégique ni son impact à long terme, certes la chute du communisme aurait pu survenir plus tôt si une victoire militaire avait récompensé l'effort américain, cependant quand on examine objectivement les résultats on réalise que le communisme au Vietnam n'a finalement remporté qu'une victoire à la Pyrrhus.
Time beats timing. L'histoire a vaincu l'actualité! Le temps a finalement donné raison à la stratégie américaine en Asie du sud-est. Si le Vietnam au même titre que la Chine s'est converti au capitalisme c'est qu'il a reconnu dans les faits quoique à posteriori la futilité de son combat contre les américains, ces derniers ne cherchaient pas à coloniser le Vietnam, simplement à endiguer la tyrannie communiste. Quel résultat durable le Nord Vietnam a-t-il retiré de son combat acharné pour conquérir le Sud? Pas grand chose: l'implantation du système communiste au Sud Vietnam a été un échec, mieux encore le Nord Vietnam sans le reconnaître ouvertement a soigneusement rangé le communisme dans le placard. La conquête du Sud Vietnam constitue certainement un gain indéniable, mais c'est le communisme qui à prime abord constituait l'obstacle principal à la réunification pacifique du Nord et du Sud!

La similitude entre la guerre du Vietnam et celle d'Irak s'arrête là. L'ennemi en Irak a retenu les leçons du Vietnam et tente de reproduire le même scénario soit gagner la guerre dans les foyers américains en s'appuyant fortement sur la "conscience vivante" de l'occident, il multiplie les carnages sachant qu'elle les mettra immédiatement et avec une délectation morbide sur le compte des américains.
Il y a aussi une différence fondamentale entre la tyrannie iranienne et celle du Vietnam. Cette dernière était de nature politique et économique, dans le but d'ouvrir la porte à la prospérité, la nouvelle génération de dirigeants vietnamiens s'est empressée de diluer le contenu idéologique de son programme jusqu'à en faire une potion homéopathique. Quoique non démocratique dans sa structure politique, le régime au pouvoir fait preuve de pragmatisme, les échanges grandissants avec les pays occidentaux ne peuvent se concrétiser en l'absence de liberté économique, celle-ci en devenant réalité pave le chemin à la liberté tout court.
Les bien-pensants ne portent aucun intérêt aux enjeux stratégiques, peu importe pour eux que les sources du pétrole tombent sous le contrôle d'états ou d'organismes extrémistes qui font la promotion du terrorisme et qui menacent la stabilité politique du moyen-orient. Si l'on se fie à leurs assurances le pétrole continuera de couler à flot. Cependant ils font mine d'oublier l'histoire, l'embargo pétrolier de 1973, à une époque où la dépendance envers le pétrole du moyen-orient était moins grande, a fait mal aux pays industrialisés et a permis en un cours laps de temps de multiplier par trois le prix du baril. Mais le prix du pétrole ne constitue qu'une part du problème, l'autre concerne le double chantage qu'un Iran nucléarisé et contrôlant le golfe persique, pourrait exercer sur le monde industrialisé particulièrement l'Europe. Chantage pétrolier et chantage nucléaire qui lui permettraient de vampiriser les ressources financières et technologiques européennes.
Le défaut de parler ouvertement des enjeux stratégiques et leur accorder l'importance qui leur revient constitue pour les journalistes et les commentateurs une omission condamnable. Il est normal que les hommes politiques fassent preuve de discrétion en abordant le sujet, ils n'ont rien à gagner à dévoiler à l'adversaire leur stratégie. Il en est tout autrement des professionnels de l'information dont c'est la responsabilité de rendre disponible des analyses objectives pour que le public puisse se faire une opinion éclairée. En s'écartant d'emblée des enjeux stratégiques ils contribuent à fausser le débat en mettant l'emphase sur des points secondaires. À l'instar des bien-pensants et très souvent en leur compagnie, ils cherchent à influencer le pouvoir en façonnant l'opinion publique, pour ce faire ils s'écartent (et s'égarent) du devoir d'informer objectivement les gens.