Rétroviseur : Irak 2003
Guerre en Irak
et si l'on regardait plus loin que le bout de son nez
Par Helios, le 10 novembre 2006
Les critiques de l'intervention en Irak se retranchent derrière une position qu'ils estiment inattaquable: les irakiens auraient connu un bien meilleur sort si l'intervention n'avait pas eu lieu. Notons au passage qu'ils partagent ce point de vue avec les terroristes d'Irak dont les attentats quotidiens ont pour but principal d'empoisonner la vie des irakiens et de rendre impossible le fonctionnement de la société civile.
Voyons si cette position est aussi solide qu'on veut bien le croire.
Ramenons le calendrier au printemps 2003. La coalition se résout à la dernière minute de ne pas envahir l'Irak, il est alors décidé de garder Saddam dans sa cage et de lui imposer sanctions et surveillance étroite, autrement dit poursuivre la politique traditionnelle à son égard, laquelle politique a échoué comme chacun sait. À partir de ce point trois scénarios plausibles auraient pu se dérouler:
- Le premier scénario et le plus probable, Saddam aurait gardé le pouvoir jusqu'à sa mort et comme il est visiblement en bonne santé son règne aurait duré encore au moins vingt ans! mais ce n'est pas tout, à son décès un de ses fils (Udai ou Qusai) lui aurait succédé perpétuant ainsi la tyrannie pour une durée illimitée. Avec Saddam et le Baath irakien au pouvoir aucun progrès possible ne pouvait être envisagé en terme de règlement à long terme du problème irakien particulièrement de la menace qu'ils représentaient pour la paix et la stabilité au moyen-orient et dans le golfe persique. Ne pouvant écarter Saddam et le Baath du pouvoir la seule avenue possible aurait été d'appliquer la politique du "containment", en d'autres termes poursuivre les sanctions économiques pour empêcher Saddam de rebâtir sa puissance militaire et surveiller ses agissements de près, ce qui devait se traduire par le maintien à l'endroit de l'Irak d'un état de siège permanant.
On a déjà vu que cette politique a échoué avec la connivence de certains occidentaux dont les français, le scandale du programme pétrole contre nourriture l'illustre bien, Saddam a empoché l'argent tout en distribuant des cadeaux un peu partout, les irakiens n'ont rien eu et par dessus le marché les pays occidentaux ont été accusés d'affamer les irakiens et de les priver de médicaments. Conséquence grave de cette politique, la détérioration graduelle et irréversible des infrastructures en Irak avec son cortège de problèmes sur les plans sanitaire et économique. Cette politique n'a pas empêché Saddam de s'enrichir, de construire des palais qu'il n'habitait même pas, de se constituer une fortune de plusieurs milliards de dollars, d'engraisser ses sbires et ses sycophantes, de terroriser et massacrer les chiites et les kurdes (80% de la population irakienne), de poursuivre ses manoeuvres et intrigues, d'accueillir des terroristes sur son territoire et de jouer à son avantage la carte des attentats suicides contre Israël, de plus sa propagande contre l'occident s'en est trouvée renforcée dans les pays arabes et même en occident où les "âmes charitables" (les mêmes, toujours les mêmes) n'ont cessé de déplorer l'impact des sanctions sur la population irakienne (aujourd'hui ces mêmes âmes charitables disent qu'elles auraient préféré qu'on poursuive les sanctions!). Tôt ou tard, la pénurie en pétrole aidant, cette politique aurait fini par échouer complètement, Saddam aurait gagné la partie et cette fois avec l'opinion publique arabe de son côté. Et nous voilà de retour à la case départ, un état voyou riche en pétrole aux vues expansionnistes dirigé par un dictateur implacable et dangereux.
- Le second scénario (probabilité intermédiaire), l'appauvrissement graduel de la population irakienne provoqué par les sanctions et le détournement des ressources à l'avantage de Saddam et de sa clique, provoquerait des soulèvements populaires lesquels seraient au départ facilement réprimés par la police et l'armée, lentement et sûrement une guérilla urbaine chiite s'installerait dans les villes très peuplées du sud, cette guérilla armée et soutenue par l'Iran connaîtrait un certain succès entraînant ainsi des représailles démesurées de la part de Saddam, représailles sans cesse grandissantes à mesure que l'insurrection prendrait de l'ampleur. La répression de l'insurrection ne se ferait qu'au prix de dizaines de milliers de tués parmi les chiites et possiblement de centaines de milliers si le soulèvement était généralisé, et cela ne tiendrait pas compte des destructions et des dommages irréversibles sur les infrastructures du pays. L'Iran ne pourrait assister aux massacres sans réagir et il est plus que probable que, dans ces conditions, les iraniens interviendraient déclenchant ainsi une nouvelle guerre Iran-Irak, mais cette fois l'Irak affaibli éprouverait de la difficulté à endiguer le flot des troupes iraniennes. La présence d'Iraniens en sol arabe amènerait Saoudiens, koweitiens et autres roitelets du golfe à réclamer le secours des américains qui n'auraient d'autres choix que d'intervenir sans préparation adéquate et sans objectif bien identifié dans un conflit aux ramifications complexes et aux conséquences imprévisibles.

- Le troisième scénario (probabilité intermédiaire), des généraux irakiens mécontents de la situation du pays réussiraient à tromper la vigilance de Saddam et fomenteraient un coup d'état, ils ne pourraient réussir complètement, Le loyalisme des tribus sunnites est acquis à Saddam, sa garde prétorienne (présidentielle) est un corps d'élite bien équipé et surclassant toutes les autres unités en terme de tactique et d'armement, il s'ensuivrait des combats entre le gros de l'armée et les unités de la garde, les sunnites alliés à Saddam sans compter ses sbires se joindraient au combat, de leur côté les chiites, encouragés et armés par les iraniens, se soulèveraient massivement dans le sud, il s'ensuivrait une guerre civile meurtrière particulièrement dans les zones très peuplées où sunnites et chiites se côtoient comme à Bagdad. Les kurdes de leur côté ne resteraient pas inactifs et leurs peshmergas tenteraient d'atteindre Kirkuk pour en chasser les sunnites que Saddam a installés au détriments des kurdes.
- Ah il y a un quatrième scénario (très faible probabilité) Saddam sous la pression internationale se désisterait pacifiquement du pouvoir et dissoudrait le parti Baath, Sous la supervision de l'ONU, déclenchement d'élections pour la nomination d'une assemblée constituante, rédaction d'une constitution suivie d'un référendum et son acceptation subséquente par la population, formation de partis politiques et élections législatives suivies de la formation d'un gouvernement représentatif.
Exception faite du quatrième scénario (hautement improbable de l'avis même des opposants à la guerre) les trois autres offriraient des PERSPECTIVES DE LOIN PLUS SOMBRES que la situation actuelle en Irak. Dans les faits la situation courante est représentée par le quatrième scénario sauf qu'elle résulte non d'un désistement "volontaire" de Saddam mais d'une évolution positive provoquée par la force des armes. Les attentats et les efforts de déstabilisation dont est victime l'Irak sont dans l'ensemble attribuables à une minorité sunnite et partisane de l'ancien régime dictatorial, elle est aidée et même poussée par le terrorisme islamique avec qui elle a fait alliance BIEN AVANT L'INVASION. l'Iran n'est pas en reste puisqu'il finance et organise les bataillons chiites qui s'attaquent en représailles aux sunnites tout en fournissant un appui matériel et logistique aux terroristes d'al Queda qui opèrent en Irak. Tout ce beau monde n'a qu'un but, l'échec de la démocratie, l'islamisme tant sunnite que chiite y est violemment opposé pour des raisons dogmatiques, quand aux anciens sbires de Saddam ils ne font que poursuivre en les amplifiant leurs exactions habituelles dans l'espoir peu réaliste de faire tomber le gouvernement et reprendre le pouvoir.
Si les opposants à l'invasion de l'Irak étaient honnêtes ils reconnaîtraient que cette invasion et l'évolution politique qui en a résulté étaient bien fondées. Les alternatives soit le statut quo, le coup d'état avec guerre civile ou le soulèvement populaire auraient provoqué des massacres et des souffrances bien plus graves que ceux perpétrés à présent par les terroristes de tous bords et les anciens sbires de Saddam, et n'auraient de toutes façons débouché que sur le chaos. Il est vrai que les choses auraient pu mieux tourner après le printemps 2003, mais c'aurait été sans compter avec le tribalisme, la haine sectaire, la violence et la cupidité de certains irakiens et de nombre d'extrémistes alimentés par l'Iran la Syrie et al Quaeda et bien servis par une propagande pernicieuse mais efficace. Sans compter l'appui moral accordé gratuitement par la gauche anti-américaine et pacifiste en occident.
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