Les réalistes ont condamné le monde à la nuit
Ils hurlent comme des loups. Piaffent d'impatience de revenir sur le devant de la scène. Tapis dans leurs bureaux, ils proclament le cynisme notre allié.
Les réalistes ont perdu Kissinger - rallié à Bush - mais tentent de regagner du terrain, comme on l'a vu récemment avec Baker. Adorés par le très français Alexandre Adler, ils sont fiers de leur bilan.
Mais quel bilan ? Lorsque les réalistes prônèrent l'entrée de la Chine dans l'ONU, Taïwan fut débarquée, et nous voilà, aujourd'hui, à espérer que le régime dictatorial communiste ultra-militarisé veuille bien pousser son voisin à renoncer au nucléaire. Lorsque l'Iran tomba, nul réaliste ne s'en émût, et lorsque le Vietnam échoua parce que la population américaine avait renoncé dans les têtes, les réalistes émergèrent, ébahis, de leur torpeur.
Aux réalistes, nous devons Münich, Sedan en 40, Pearl Harbor, la crise des missiles de 1962, nous devons une URSS sur-puissante au début des années 1980, nous devons le 11 septembre, la première guerre du Golfe et la menace irakienne en 2002... Aucun des pays avec lesquels ils ont négocié n'est devenu un allié sûr. Aucun n'est devenu démocratique grâce à eux, aucun n'a renoncé à vouloir la perte de l'Occident. Cuba, la Chine, l'Iran, la Corée du Nord, l'Irak, l'Arabie Saoudite, la Palestine... Quel différence avec les pays libérés par des politiciens épris de moralité ! La Corée du Sud de Truman, les Etats de l'Est européen de Reagan, l'Afghanistan et l'Irak de Bush sont à nos côtés. Reveillez-vous ! Le réalisme a failli nous faire perdre la deuxième guerre et la guerre froide, pourquoi continuons-nous à lui laisser la parole ?
Ces réalistes aiment le cynisme. Ils feignent d'ignorer que la moralité et la démocratie créent des sociétés libres, et que ces sociétés heureuses deviennent, par effet domino, des alliés sûrs pour les démocraties de l'Occident. Nous n'avons aucun intérêt à parier à long terme sur les dictatures, parce qu'elles se retourneront contre nous. Le cas du Moyen Orient est très clair à ce sujet. Lorsqu'un Alexandre Adler demande l'intervention de la Syrie et de l'Iran dans la stabilité irakienne, il faudrait lui rappeler que l'Iran veut la bombe nucléaire et cherche à "rayer Israël de la carte". Mais c'est là que la bât blesse : aux yeux des réalistes, le génocide des Juifs n'était pas évitable. Pour eux, Auschwitz n'est pas choquant. Ils trouveront des millions de raisons aux Alliés pour n'avoir pas attaqué l'Allemagne avant 1939. L'oeil sévère, à l'aide d'une réthorique compliquée, ils vous diront que l'Histoire est ainsi faite que les génocides ne peuvent être évités. Le seul qu'il veulent éviter, c'est celui qui pourrait les tuer. Oubliez Churchill, ils lisent Machiavel.
Leur aveuglement est à la mesure des enjeux en cours : nous sommes au XXIe siècle. Soit l'Occident contribue à changer l'islam, soit l'islam va changer l'Occident, à commencer par l'Europe. Toutes les autres alternatives nous feraient tomber les situation de dictature où nous chasserions les musulmans. Cela n'est pas envisageable et ne doit plus jamais l'être contre quiconque.
Partisans de l'égocentrisme exacerbé, amis de toute ce que la terre compte de dictateurs, les réalistes tiennent un autre discours : ils continuent gaiement à remplir les charniers tout en clamant sauver le monde. Au final, leurs théories accouchent plus souvent de cadavres putréfiés que de masses libres gonflées de vie, mais ils ne s'en émeuvent pas. Non ! A les suivre, il faudrait continuer la politique du 10 septembre qui a alimenté l'islam radical afin... de le combattre ! Comprenne qui pourra ! Leurs glorieux ancêtres de Weimar croyaient aussi offrir le pouvoir à Hitler pour le contrôler, et ont terminé à Dachau.
Lorsque l'Europe sera devenue un continent soumis à l'islam radical, les réalistes viendront compatir avec vous et vous pleurerez ensemble à chaudes larmes. A moins que, en souhaitant vivre aux côtés des totalitaires, ils finissent pas disparaître avec eux.