Petit tour d'horizon
C'est fou le nombre de "reponsable américain" et de "militaire anglais" qui parlent de retrait d'Irak ces derniers temps. Les journaux citent rarement des noms, mais précisent "un responsable qui a requis l'anonymat". Info, intox ? Comme l'a souligné le journaliste Bill Sammon, les médias citent n'importe quel type qui entre ou sort de la Maison Blanche comme étant un "conseiller de Bush", et quel que soit le grade d'un responsable du Pentagone, ils parlent de "responsable militaire", comme si un général valait un colonel, comme si le Département de la Défense et ses dizaines de milliers de fonctionnaire formaient un corps uni où n'existait aucun débat...
Le vent tourne déjà : les Démocrates essaient de revenir à la raison et conseillent à leurs partisans de cesser leurs démonstrations d'enthousiasme, de peur de se faire humilier le 7 novembre prochain :
http://www.washingtontimes.com/national/20061025-121107-9858r.htm
Dans le passé, les journalistes ont déjà trébuché, parfois involontairement, souvent en connaissance de cause : en 2004, un fonctionnaire du Pentagone a rendu un rapport sur le réchauffement climatique si grossièrement faux que le Département de la Défense en a interdit la publication. Qu'à cela ne tienne, les thèses ridicules de ce memo ont terminé dans votre journal dominical. Dans la même veine, j'ai lu dernièrement un livre très intéressant consacré à l'affaire Grégory. Vous savez, le petit gosse retrouvé mort dans une rivière, en France, au milieu des années 80. Eh bien, contrairement à la rumeur, son meurtrier a bien été retrouvé, et les preuves l'accablant également. Mais les médias, aidés par un juge d'instruction d'une totale incompétence, se sont créés une saga judiciaire et en parlent encore. S'excuseront-ils du mal qu'ils ont fait ?
A lire : http://www.amazon.fr/gp/product/2714442528/ref=pd_rvi_gw_2/402-5745200-9967364?ie=UTF8
Devenus les échos des théories les plus farfelues, nos chers médias sont en grande forme pour cette saison automnale. Outre les fausses citations, les rapports foireux, les allusions douteuses, les manipulations d'information, l'omission de faits avérés et l'invention d'évènements, ils offrent leurs colonnes - ou leurs plateaux de télévision - à n'importe quel type, du moment qu'il embrasse leurs idées. Dernièrement, l'ex-premier ministre irakien des Finances du gouvernement intérimaire, remplacé en janvier 2005, a déclaré à CBS News que la nouvelle administration irakienne avait détourné 500 millions $ destinés à la sécurité du pays. Impertubables, les médias du monde entier reprennent ce chiffre : en quelques mots, nous disent-ils, ce ministre a démontré que la vision française qui consiste à financer les dictateurs massacrant leur population est tout à fait louable. Cette politique, qui regarde les Irakiens et les Arabes sous le joug des dictatures avec dédain et mépris, devient soudainement morale - voire défendable ! Pour sa défense, on pourrait arguer qu'après tout, le gouvernement français a autant de respect pour ses propres citoyens qu'il en a pour ceux qui vivent dans le monde extérieur, c'est-à-dire aucun. S'il faut soutenir Saddam Hussein et alimenter l'islam radical qui cherche à tuer des Français pour augmenter le prestige de Chirac, le gouvernement n'hésitera pas. Louis XIV non plus n'hésitait pas.
Aujourd'hui, un édito Renaud Girard, grand reporter du Figaro, reprend les plus basses théories de complot que l'on retrouve sur le Réseau Voltaire :
Le 5 février 2003, jour du célèbre débat sur l'Irak au Conseil de sécurité qui fut diffusé sur les écrans de télévision du monde entier, le pouvoir de dissuasion américain était à son apogée. Le déploiement de 50 000 hommes de troupe au Koweït avait suffi à faire comprendre que, sur ce dossier, l'Amérique, était très sérieuse. Saddam Hussein l'avait d'ailleurs compris qui, via le faucon Richard Perle, avait secrètement transmis à Washington des propositions où il acceptait toutes les exigences américaines. Perle, le « prince des ténèbres », avait tout fait pour enterrer ces propositions qui désamorçaient le conflit annoncé, et l'entourage du président Bush fut bien mal avisé de ne pas les prendre en considération. C'était l'époque où l'Iran proposait lui-même de suspendre ses activités d'enrichissement d'uranium pour preuve de sa bonne foi.
Il n'y a, bien sûr, jamais eu de quelconque lettre ou proposition de la part de Saddam Hussein qui aurait accepté toutes les exigences américaines - dont son reconcement au pouvoir ! - mais ce reporter ose l'écrire, son rédacteur ose le publier et des dizaines de milliers de lecteurs vont oser le croire... Comment peut-on tomber si bas, sérieusement, dans une démocratie ? Comment la rédaction du Figaro peut-elle continuer sur cette voie de garage sans sentir l'humiliation la couvrir et le déshonneur ruiner son crédit face aux esprits libres ? Quel goût ont ces journalistes de faire une si basse besogne ?
Pour revenir à notre cher ex-ministre irakien des Finances... Son nom est Ali Allawi. C'est le cousin de l'ex-premier ministre, Iyad Allawi, éjecté de son poste par les élections démocratiques d'Irak en janvier 2005. Profondément vexé, Iyad Allawi a passé les années 2005-2006 à lancer des rumeurs et des accusations sans fondement dans les médias. Il a notamment dit qu'il y avait clairement une guerre civile en Irak et que "les tortures sont plus nombreuses aujourd'hui qu'elles ne l'étaient sous Saddam Hussein." Ces deux assertions ne résistent pas au plus sommaire examen de la situation irakienne, mais Allawi s'en moque et les médias qui le citent également. Résumons : le cousin de ce menteur, cet ex-ministre des Finances, est à l'origine de l'accusation diffamante contre le nouveau gouvernement irakien. Suspect, non ? L'oncle de ce même perroquet, le tristement célèbre Chalabi, a été lui aussi éjecté d'Irak, pour complicité avec l'Iran. Ne serait-il pas logique d'estimer que les Allawi ne sont pas des sources sûres, et qu'il faut prendre leurs affirmations avec circonspection ?
Raisonnement élémentaire... donc introuvable dans votre quotidien.
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