Témoin dans le mauvais camp
Il est des évènements qui marquent. Etant malheureusement Européen, j'aurais vécu la guerre en Irak depuis mon continent totalitaire. Mes compatriotes et les médias auront soutenu jusqu'au bout le régime le plus sanglant des temps modernes. Ils auront salué avec enthousiasme toute annonce de mort de civils innocents, ils auront bavé de rage sur les cadavres des enfants massacrés par le dictateur.
J'aurais pu être témoin de la guerre en Irak depuis les Etats-Unis, la Grande-Bretagne ou l'Australie. En lisant les journaux, en regardant la télévision, j'aurais pu entendre les pleurs des résistants irakiens, si heureux de voir disparaître l'horreur, enfin. J'aurais pu lire des témoignages, écouter des rires, des chants, des poèmes. J'aurais pu visiter, par médias interposés, l'horreur des cuves à acide où se noyaient les innocents, la bestialité des harems de fillettes de Usaï et Kussaï, les niches de sang où des doberman dévoraient les insoumis.
Mais voilà. Je suis Européen. Francophone plus particulièrement. Cela m'a condamné à vivre l'évènement dans le mauvais camp. Cela m'a obligé à le vivre parmi les collabos, les imbéciles, les ratés, les criminels, les totalitaires et les irresponsables.
J'ai suivi l'actualité diffusée par la France, le pays le plus crépusculaire de tout le continent. J'ai vécu la plus grande offensive contre le nouveau totalitarisme depuis l'une des bases arrières de ce même totalitarisme. J'ai suivi le débarquement depuis le QG de la milice. J'ai suivi la libération d'un pays où on gazait des enfants et leurs mères depuis un autre pays, démocratique paraît-il, qui souhaitait que ces horreurs se poursuivent...
Les francophones ne méritent pas qu'on s'apitoie sur eux. Par trois fois, ils ont reçu un avertissement. Il y a eu le fascisme brun, le fascisme rouge, le fascisme vert. Ils ont goûté à toutes les coupes. Ils se déshonorent. Ils se crachent au visage. Ils vomissent sur les autres. Lâches et puériles bipèdes sans cerveau, ils continuent à chanter pour le Maréchal. Quelle que soit leur nationalité. Si la langue française réunit, c'est bien dans la médiocrité.
"Toute idée fausse se termine dans le sang, mais c'est le sang des autres. C'est pour cela que nos philosophes sont si à l'aise pour dire n'importe quoi" disait Camus. Je suis trop jeune pour avoir vécu au temps du nazisme mais je sais, désormais, ce que veut dire "fanatiser un peuple". Les Français le sont, comme aucun autre pays développé. Les francophones sont contaminés à leur tour. Cette fois-ci, cela risque bien d'être fatal.
Quant à moi, je rattrape le temps perdu en contemplant les sourires des Irakiens qui goûtent à la démocratie avec gourmandise. La liberté s'éteint dans le monde francophone, tant pis. Qu'elle naisse chez ceux qui la méritent.
Longue vie à l'Irak libre!