Comment reconnaît-on un bon analyste ?
Savez-vous comment on distingue un penseur lucide, rigoureux, visionnaire ? Un analyste, un vrai ? Un intellectuel, avec tout ce que ce terme implique ?
C'est plus simple que vous pourriez le penser. L'Intellectuel, en analysant la réalité avec acuité, réfléchit et pose un jugement dont la réalité lui prouvera la justesse.
Lisez "l'obession anti-américaine" de JF Revel (Plon, 2002). Le chapitre sur les violences des banlieues sied en tous points à ce qui s'est passé en novembre 2005. Celui sur les méthodes antiaméricaines rappelle tout ce qui se passe en Europe depuis 2003, au moins.
Lisez "pourquoi Bush sera réélu", de Guy Millière, (Michalon, 2004), publié en juillet 2004. Le titre du livre, tout comme son contenu, colle parfaitement à ce qui s'est passé en novembre 2004. Tout ce que l'auteur prévoit s'est déroulé.
Lisez "Eurabia" de Bat Y'eor (JC Godefroy, 2006), et regardez votre journal télévisé local...
Lisez Ivan Rioufol, "Chronique d'une résistance" (Rocher, 2006). Les chroniques du journaliste du Figaro décortiquent la réalité avec luicidité. Rioufol a publié un livre reprenant ses propos tout le long des deux dernières années. Un pari risqué. Et réussi. La marque des grands.
Lisez "The West's last chance" de Tony Blankley (Regnery, 2006) : l'auteur prévoit la crise des carricatures puis celle du discours du pape avec des mois d'avance.
Un exemple, parmi tant d'autres. L'article de Guy Millière dans les 4 Vérités Hebdo, publié trois mois avant les attentats du 11 septembre, le 9 juin 2001 précisément. Cela se passe de commentaires :
Israël et le Moyen Orient, Guy Millière, les 4 vérités Hebdo, 9 juin 2001
Depuis quelques mois, les incidents au Moyen Orient s’intensifient et prennent chaque jour davantage la tournure d’une guerre aux nuances terroristes. Les Occidentaux souhaiteraient la paix, bien sûr. Nombre d’Israéliens aussi. Je suis loin d’être certain qu’on puisse en dire autant des populations arabes du Moyen Orient. Et j’ai bien peur que la façon qu’ont eue régulièrement les Occidentaux de parler de paix n’ait contribué à favoriser la guerre.
Jamais les Arabes n’accepteront vraiment l’existence de l’état d’Israël. Je l’ai déjà dit. Et je pense utile de le répéter. Au mieux, les Arabes se résigneront à l’existence d’Israël. Un Arabe plongé dans un contexte de civilisation occidentale pourra se rapprocher du modèle occidental. Un Arabe placé dans un contexte massivement arabo-musulman se conduira comme le contexte implique qu’il se conduise : en membre de la umma, communauté musulmane des croyants, soumis à la volonté de Dieu et aux appels de ceux qui le représentent, ulema, docteurs de la foi, ou mufti. Si le mufti (ce qui est le cas pour le mufti de Jerusalem aujourd’hui) appelle à la guerre sainte, djihad, il mènera la guerre sainte, même si celle-ci implique qu’il sacrifie sa vie. Si ses chefs lui rappellent que dans l’Islam, il n’y a jamais que deux territoires, le territoire de l’islam, dar el islam, déjà musulman, et le territoire de la guerre, il comprendra ce qui lui reste à faire : défendre le dar el islam et combattre pour qu’il s’étende. Il se souviendra de surcroit que dès lors qu’un territoire a fait partie du dar el islam, il en fait partie pour toujours. Tout le territoire d’Israël a fait un jour partie du dar el islam : un bon musulman doit par conséquent se battre pour mettre fin à ce sacrilège qu’est l’état d’Israël en lui-même. Et tout le reste n’est que littérature.
Au moment des accords d’Oslo, Israël était en position de force. Une paix de résignation aurait été possible. Depuis, chaque geste conciliant qui a été fait par Israël a été interprété par les arabo-musulmans comme un signe de faiblesse et comme un encouragement à se battre. Les positions prises par Ehud Barak à Camp David ont été prises par la partie adverse non comme des gestes généreux, mais comme des preuves de lâcheté et ont par conséquent fait l’effet de l’huile sur le feu.
Ce qu’Ariel Sharon tente de faire aujourd’hui, et que, bien sûr, les Occidentaux ne comprennent pas, est de revenir à la situation d’avant Oslo et de faire comprendre à ses adversaires qu’Israël ne cèdera pas d’un pouce et qu’ils doivent l’accepter. Si Sharon peut mener sa politique jusqu’au bout, un certain résultat sera obtenu et ce résultat sera la survie d’Israël, et une paix froide et armée avec les pays arabes voisins. Si Sharon ne peut mener sa politique jusqu’au bout, ce sera l’embrasement et la guerre. Les arabo-musulmans, c’est une évidence, souhaitent la guerre et pensent pouvoir la gagner : Israël à leurs yeux a fléchi avec Barak et peut fléchir encore. Les Occidentaux, par ailleurs, semblent divisés et indécis. Israël ne peut pas perdre la guerre et les Occidentaux le savent.
Si la guerre éclate, ils seront donc impliqués, et cette implication sera coûteuse dans tous les sens du terme.
Le pire n’est pas encore sûr. Mais pour qu’il ne survienne pas, il serait très largement temps que les diplomates européens et américains comprennent que lorsqu’ils parlent à des interlocuteurs arabo-musulmans, ils ne parlent pas avec des Occidentaux, mais avec des gens qui ont dans la tête une façon tout autre de voir les choses et des règles du jeu très différentes.
Pour que les conséquences multiples du pire ne surviennent pas, il serait très largement temps aussi que les diplomates européens et américains comprennent que ce qui se joue dans le conflit israélo-palestinien n’est, dans la tête de millions de gens du monde arabo-musulman, que l’un des épisodes du conflit millénaire entre la civilisation occidentale et la civilisation musulmane. À trop jouer l’atermoiement, les Occidentaux pourraient bien un jour finir par s’apercevoir qu’eux-mêmes ne paraissent pas très courageux et pas très respectables aux membres de la civilisation musulmane à qui une victoire sur Israël ouvrirait sans doute l’appétit.
Lentement, l’idée que l’Islam va triompher fait son chemin dans les terres d’Islam. Déjà, les Occidentaux ont reconnu l’existence d’un peuple palestinien, peuple dont on aurait peine à trouver trace dans un livre d’histoire. Déjà les Occidentaux disent que ce peuple a droit à un État et semblent ne plus se souvenir de ce qui s’est passé voici un peu plus de cinquante ans lorsqu’Israël a vu le jour. Déjà les Occidentaux acceptent de financer une entité palestinienne où leur argent sert non pas au développement et à la stabilité, mais à l’achat d’armes et d’explosifs et au maintien des populations dans la famine et le fanatisme propice au sacrifice humain. Les Occidentaux n’ont plus de mémoire et plus de discernement.
